DECONSTRUCTED / STEVE SWALLOW
(Label : Watt)
Steve Swallow - Bass ; compositions / Chris Potter - tenor saxophone / Mick Goodrick - guitar / Ryan Kisor - trumpet / Adam Nussbaum - drums.
Enregistrement réalisé au Studio « Grog Kill Studio » à New York en décembre 1996.
« Deconstructed », « déconstruit »...
Curieux nom pour cet album de Steve Swallow réalisé en décembre 96 dans un petit studio newyorkais.
Après plusieurs écoutes attentives, le titre pourrait sembler mal choisi en raison notamment de la cohésion des musiciens, de la cohérence de l’écriture et des musiciens.
Pourtant si l’on écoute et réfléchit, ce disque peut s’annoncer comme une proposition, une invitation à la reconstruction des pièces musicales qui se succèdent sans jamais lasser.
Le « chant harmonique » constamment sous jacent permet la « composition déconstruite » des mélodies et offre ainsi du « sens » au titre générique de ce CD.
Le disque s’ouvre sur Running in the family avec une introduction solo à la basse. Swallow est, comme toujours, précis et lisible dans ses propos. Il nous présente la « grille d’accords » et la « raconte » avec un sens rare de la mélodie .
Découvrant dès la première écoute l’écriture tout à la fois sobre et savante : les grilles harmoniques sont simples, mais les arrangements sont raffinés ; le jeu contrapuntique des deux voix principales (le sax ténor en la personne de Chris Potter et la trompette en celle de Ryan Kisor ) fait penser tantôt à l’écriture de Monk (Evidence), tantôt à l’écriture des musiciens de la Westcoast (filiation Giuffresque...).
On pourra remarquer le choix délibéré de Swallow d’allier consécutivement certains types d’intervalles dissonants (secondes) à d’autres plus stables (septièmes, sixtes) dans un espace qu’il sait étirer à souhait, pour provoquer chez l’auditeur une sensation de souplesse et de tonicité, de tension et de résolution.
Les autres musiciens sont irréprochables notamment Mick Goodrick , guitariste dont on entend trop peu parler (avec qui John Scofield prit des cours...) et qui fait montre dans ce disque d’une personnalité discrète mais subtile. Adam Nussbaum nous délivre une leçon de « drive » et son jeu généreux et énergique à la batterie nourrit de manière efficace la musique de Swallow.
Cet album sonne comme une projection « néo-traditionnelle-jazzistique » liée à la culture de l’incontournable Realbook - bible des jazzmen et apprentis jazzmen - qui recense la plupart des standards de ce dernier siècle.
Je m’exlique : Swallow nous avait déjà proposé un album baptisé tout simplement « Real Book » il y a quelques temps de cela, « Deconstructed » va dans le même sens...
Et l'on ne s’en plaint pas !
Article mis en ligne le 3 décembre 2009 par Pierre-Jean Ulpat